La conciliation est une procédure collective dite amiable de traitement des difficultés d’une entreprise qui se déroule sous la supervision d’un tribunal et qui fait intervenir un tiers appelé conciliateur chargé de négocier avec les créanciers. Il s’agit d’une procédure préventive qui doit être déclenchée avant que l’entreprise n’ait atteint un degré trop important de difficultés.
La conciliation
Les caractéristiques de la conciliation
La conciliation présente plusieurs caractéristiques :
- Un caractère facultatif : seul le débiteur peut demander auprès du président du tribunal la désignation d’un conciliateur. Cette procédure repose donc sur le bon vouloir de l’entreprise qui connaît des difficultés.
- Un caractère préventif : l’idée est d’ouvrir cette procédure avant que l’entreprise en question ne soit en état de cessation des paiements c’est-à-dire avant que son actif disponible ne lui permette plus de faire face à son passif exigible. L’ouverture de la procédure n’est plus possible lorsque le débiteur est en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours.
- Un caractère amiable : le fonctionnement de la procédure et l’existence d’un éventuel accord entre l’entreprise et ses créanciers est basée sur la volonté de ces derniers. Aucune mesure ne saurait être imposée à ceux-ci sans leur accord.
- Un caractère confidentiel : ce caractère confidentiel est garanti par la loi qui prévoit que toute personne appelée dans le cadre d’une conciliation ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité. La conciliation est donc un excellent moyen de traiter des difficultés au sein de l’entreprise sans éveiller l’inquiétude chez les personnes qui y travaillent mais également chez les personnes qui travaillent avec cette société. Nous le verrons, l’étendue de la confidentialité varie selon la forme de l’accord final conclu entre le débiteur et les créanciers.
Le déroulement de la conciliation
L’ouverture de la conciliation
La conciliation est ouverte à toutes les entreprises qui exercent une activité commerciale ou artisanale. Cela comprend toutes les personnes morales (SARL, SAS, …) mais également les personnes physiques qui exercent une activité professionnelle indépendante. Cette activité peut être une activité purement commerciale (achat pour revente de biens, …) mais également une activité libérale.
Pour demander l’ouverture d’une conciliation, l’entreprise doit réunir plusieurs conditions :
- Elle doit faire face à des difficultés d’ordre juridique, économique ou financière ;
- Le débiteur ne doit pas se trouver en situation de cessation des paiements depuis plus de 45 jours. La cessation des paiements correspond à la situation dans laquelle l’actif disponible du débiteur c’est-à-dire ses liquidités, ne lui permet pas de faire face à son passif exigible c’est-à-dire ses dettes ;
- Le débiteur ne doit pas avoir bénéficié d’une conciliation ayant pris fin il y a moins de 3 mois. Autrement dit on ne peut pas enchaîner les procédures de conciliation trop rapidement.
La nomination d’un conciliateur
S’il remplit les conditions pour qu’une procédure de conciliation soit ouverte à son égard, le débiteur c’est-à-dire la personne physique qui connaît des difficultés ou le représentent légal de la société peut demander par voie de requête l’ouverture d’une conciliation à son égard. Il doit exposer dans cette requête sa situation économique, sociale et financière, ses besoins de financement ainsi que les moyens d’y faire face.
Il peut alors proposer le nom d’un conciliateur ou demander au tribunal d’en choisir un pour lui. Le président convoque le débiteur, recueille ses explications et, s’il fait droit à sa demande, désigne un conciliateur. Il fixe alors la rémunération du conciliateur.
Le conciliateur ne peut avoir par principe, au cours des 24 mois précédents, perçu, à quelque titre que ce soit, directement ou indirectement, une rémunération ou un paiement de la part du débiteur intéressé, de tout créancier du débiteur ou d’une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui. La seule exception est le cas où il s’agit d’une rémunération perçue au titre d’une conciliation ou d’une mission de règlement amiable ou de mandat ad hoc réalisée pour le même débiteur ou le même créancier.
Ce conciliateur est nommé pour une durée initiale qui ne peut être supérieure à 4 mois. Cette durée est prorogeable mais la durée totale ne peut, en tout état de cause, être supérieure à 5 mois.
La mission du conciliateur
« La mission du conciliateur est de faciliter la conclusion entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant, ses cocontractants habituels, d’un accord amiable destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise. » (citation) Il peut également présenter toute proposition ayant pour objet la sauvegarde de l’entreprise, la poursuite de l’activité et le maintien de l’emploi. Il peut également sur demande du débiteur et après avoir recueilli l’avis des créanciers, préparer la cession de l’entreprise à un tiers, cession intervenant dans le cadre d’une procédure judiciaire. Le conciliateur doit rendre compte de sa mission au président du tribunal.
La négociation avec les créanciers
Les créanciers peuvent exercer des poursuites individuellement à l’encontre de l’entreprise en difficulté. Cependant le tribunal pourra dans une telle situation prononcer un délai de grâce et ainsi reporter ou échelonner le paiement des dettes du débiteur dans la limite d’une durée de deux ans. Ces délais de grâce octroyés à l’entreprise bénéficient également au garant de cette dernière. Si vous vous êtes porté caution de votre entreprise vous êtes donc protégé et vous bénéficierez des délais de paiement accordés à celle-ci.
Au cours de la conciliation vous êtes, en tant que débiteur, chargé de faire des propositions afin de tenter de convaincre les créanciers de l’entreprise d’accorder des remises ou des délais. Les créanciers pourront quant à eux parfaitement refuser d’entrer dans la procédure, les délais et remises accordés par les créanciers se faisant uniquement sur la base du volontariat. Votre avocat sera là pour vous accompagner lors des différentes étapes de cette négociation
La conclusion de l’accord
L’accord aura des effets différents selon la forme qu’il prend :
- La forme constatée : le débiteur doit certifier qu’il n’était pas en cessation des paiements lors de l’ouverture de la conciliation ou que la conciliation a mis fin à la cessation des paiements. Le président procède alors à un contrôle formel et statue au vu de la déclaration. Le tribunal constate l’accord ce qui lui donne force exécutoire.
L’avantage c’est qu’il n’y a aucune publicité attachée à cette constatation. La confidentialité est donc pleinement préservée. L’inconvénient est que l’accord pourra être annulé si l’on se rend compte que le débiteur était en état de cessation des paiements au moment de la conclusion de l’accord.
- La forme homologuée : pour obtenir cette homologation, le débiteur ne doit pas être en état de cessation des paiements ou l’accord doit être en mesure de mettre fin à la cessation des paiements. De même, les termes de l’accord doivent être de nature à assurer la pérennité de l’entreprise. Enfin, l’accord ne doit pas porter atteinte aux intérêts des créanciers non-signataires ce qui serait le cas, par exemple, si des créanciers se voyaient consentir des sûretés trop importantes.
Lorsque le débiteur remplit ces conditions et qu’il a demandé l’homologation de l’accord, la conciliation se prolonge en attendant la décision du tribunal, lequel va procéder à l’audition du débiteur, des créanciers parties à l’accord, des représentants du personnel, du conciliateur et enfin du ministère public. Le tribunal prononce ensuite le jugement d’homologation et des mesures de publicité sont organisées. L’homologation de l’accord entraîne donc une grosse perte de confidentialité.
Les effets de l’homologation sont en revanche avantageux par rapport à la constatation. En effet, l’homologation de l’accord empêche l’annulation de celui-ci au motif que le débiteur aurait été en état de cessation des paiements au moment de la conclusion de l’accord. De même, l’homologation de l’accord octroie aux créanciers le privilège de la conciliation aussi appelé privilège de new money. En vertu de ce privilège, les créanciers qui consentent quelque chose de nouveau au débiteur (octroie d’un prêt, fourniture d’un service, …) en vue d’assurer la pérennité de l’entreprise et sa continuité pourront se faire payer en priorité pour le montant de ce privilège. Pour le débiteur, l’avantage de l’homologation résulte du fait que si l’accord est homologué il bénéficiera de la levée de l’interdiction de tirer des chèques.
Votre avocat vous conseillera sur le meilleur choix à prendre quant à la forme de l’accord.
L’issue de la procédure de conciliation
La conclusion de l’accord avec les créanciers va mettre fin à la procédure de conciliation. Pour les créances faisant l’objet de l’accord, les créanciers ne peuvent plus poursuivre le débiteur. Le contrat est obligatoire pour eux et ils doivent en respecter les termes. En revanche pour les créances qui ne sont pas dans l’accord, les créanciers peuvent toujours poursuivre le débiteur en paiement étant précisé que dans cette situation, si le président du tribunal octroie des délais de grâce, les garants de l’entreprise ne pourront pas s’en prévaloir. En revanche ces garants pourront se prévaloir de l’accord négocié avec les créanciers. Ainsi, s’il est prévu dans l’accord une remise de dette par un créancier, ce dernier ne pourra pas se retourner vers le garant de l’entreprise afin de se faire payer l’intégralité de la dette. Il devra respecter les termes de l’accord y compris à l’égard de ces garants.
L’accord conclu entre le débiteur et les créanciers peut prendre fin dans trois situations :
- Si l’accord n’est pas exécuté, les parties à l’accord c’est-à-dire l’entreprise et les créanciers peuvent saisir le tribunal afin qu’il prononce la résolution de l’accord. Si une telle résolution est prononcée, l’accord va disparaître rétroactivement. A cette occasion le tribunal pourra également prononcer la déchéance des éventuels délais de grâce accordés pendant et à l’issue de la conciliation.
- La caducité de l’accord lorsque celui-ci n’a plus d’objet, qu’il a été pleinement exécuté.
- L’ouverture d’une procédure judiciaire à l’égard du débiteur. Cette ouverture met fin de plein droit à l’accord constaté ou homologué.
Votre avocat sera là pour vous conseiller sur l’opportunité de l’ouverture de la conciliation. Il vous expliquera les différentes étapes de celle-ci et vous orientera quant aux différents choix stratégiques qui doivent être pris tout au long de la procédure.